
En 1932 comme dans les années 1940, 1950 et 1960, la ville de Lessines organisait très souvent des courses pour les professionnels et les indépendants. Mais vous le savez, il y avait aussi beaucoup d’épreuves pour les jeunes et pour les non licenciés. De nos jours, tout cela a bien changé. Tout coûte cher et puis, l’intérêt pour le cyclisme n’est plus le même.
Regardons maintenant l’article se trouvant ci-dessus. Il est paru à la date du 14 mai 1932 dans le journal local « Le Postillon ». Et que peut-on y lire ? Il s’agit déjà du « 10e GP Georges KUGE ». Nous pouvons donc en déduire que le premier a eu lieu vers 1922. Soit juste après la guerre de 1914-1918. Et pourquoi Georges KUGE ? Parce qu’il s’agit d’un lessinois d’origine allemande qui a œuvré pour la Belgique comme espion et qui a été fusillé en 1917. Georges KUGE a sa rue perpendiculairement à la Grand Rue de Lessines, aux environs du coiffeur « Bernard ». Nous pouvons y lire qu’il s’agit d’une épreuve réservée aux indépendants. A l’époque, c’était une catégorie située entre les amateurs et les pros. Ils étaient relativement nombreux. Il s’agissait d’une activité complémentaire ou principale. Le tout se faisait sous l’égide de la L.V.B (la ligue officielle) qui est devenue avec le temps la RLVB. Soyez aussi attentifs au fait que les trois principaux journaux sportifs de l’époque s’associaient pour l’occasion : « Les Sport » (sans « s »), « Sportwereld » et « Les Sports Illustrés ». Nous possédons encore quelques brochures des deux dernières citées. Les prix attribués étaient attractifs. 5000 frs au total, cela représentait plus d’un salaire mensuel d’un employé. C’est dire s’il y avait des sous dans le milieu. Sans oublier les primes de 50 frs à chaque passage. Difficile de comparer avec ce qui se passe de nos jours. Le franc a dévalué, les matières premières ont augmenté, la mondialisation s’est installée. Le vainqueur remportait même 1000 frs. Pas étonnant que le cyclisme attirait du monde. Le gagnant remporte aussi la coupe « ULTRA ». La pièce maîtresse « Coupe Georges KUGE » est remise à l’équipe qui a trois de ses coureurs les mieux placés. Enfin, les dix suivants reçoivent une breloque souvenir. Une médaille ? Une statuette ? Nous n’avons pas d’information sur ce sujet. Alors, le parcours. Regardez-le bien, il vaut le détour si on peut dire. La grande boucle sillonne toute la région jusqu’à Grammont, Frasnes, Ath, Brugelette et Silly. Les petites boucles sont à parcourir à six reprises mais restent dans ce que nous pourrions appeler aujourd’hui, l’entité de Lessines. Inscription 5 frs. Mine de rien, ce n’était pas pour rien. Les formalités se prenaient sur la Grand Place chez Lesure. C’était un commerçant local. Pour 200 km avec un départ à 11h, pas sûr qu’ils étaient rentrés pour 17h00. N’oublions pas qu’il y avait encore beaucoup de routes pavées et recouvertes de terre en 1932. Pour se prémunir, les organisateurs déclinent toute responsabilité en cas d’accident. Une formule habituelle qui a fonctionné durant plus de 80 ans. Vous la retrouvez encore sur certains documents d’inscription. Pour terminer, petite touche cocasse avec le fait que les flobertistes se feront entendre pendant la course. Une société de tir va égayer les passages à vide. Nous constatons que ce genre d’annonce est riche d’enseignements. Elle permet de faire des recherches et de se replonger dans un autre monde. Pour la petite histoire, l’article des résultats a été publié juste après l’épreuve du 19 juin 1932. C’est COQUEREAUX qui est vainqueur devant 42 participants. Il a eu beaucoup de chance car on y apprend aussi que les deux BRUNEAU, Emille et Gustave, devaient l’emporter mais le premier a fuité à un kilomètre de l’arrivée et le second a eu un ennui mécanique. MALBRECQ (le Marquis-Silly), BLAVIER, BROUILLARD (Ath), VANDENBERG, NOTERMAN, MOERENHOUT, DURY, PIETQUIN, MERTENS, DESCHEPPER et surtout François DEMEYER (le père de Lucien, le Maquet-Lessines) ont fait une course splendide. Un monde fou a assisté à cette course qui passait dans le centre de Lessines.
